Samstag, 7. Juni 2025

Eine sinnvolle Aktivität erkennst du daran, dass sie dir Freude macht. Echte Freude ist oft nicht so einfach zu erkennen. Deshalb ist es zum Beispiel wichtig, über sich selbst lachen zu können. Ich stimme Adrien Candiard auch in den letzten Seiten seines Buches Quand tu étais sous le figuier… (ISBN 978-2-204-12105-7) zu, wo er schreibt:

À vrai dire, je ne connais pas de meilleur critère de discernement d’une vocation que la joie.

J’emprunte souvent à un roman des années 1950, pour en parler, en particulier avec des jeunes, une expression que je trouve assez juste: la «ligne de joie». Elle dit bien que cette joie n’est pas une disposition de caractère ni un état d’euphorie permanent. Je ne suis pas sûr qu’on pourrait trouver une vie chrétienne constamment guillerette, que ne traverserait jamais la détresse ni l’acédie; je ne sais où on pourrait la trouver, mais ce ne serait certainement pas dans la vie des saints. La ligne de joie, c’est une manière d’être à sa juste place, là où la joie de Dieu peut nous traverser. Se savoir sur sa ligne de joie permet de passer les orages sans trop de casse, de pouvoir être à la fois profondément malheureux et troublé et, plus au fond, parfaitement paisible. Cette joie n’empêche pas de vivre les chagrins de la vie pleinement, de pleurer des larmes qui ne sont pas feintes sous prétexte que notre vie n’est qu’illusion. Mais tant qu’on ne quitte pas sa ligne de joie, ce chagrin n’est pas le plus fort.

J’ai souvenir d’une rencontre avec une jeune fille de dix-neuf ans, qui s’interrogeait avec inquiétude sur sa vocation. Elle pensait, me dit-elle, qu’elle devait devenir religieuse, mais elle trouvait que Dieu n’était tout de même pas très explicite dans son appel, et cela l’angoissait assez profondément. J’essaie donc de lui faire dire pourquoi elle se sent faite pour la vie religieuse: connaît-elle des sœurs dont l’exemple l’attire? Éprouve-t-elle de l’enthou-siasme quand elle entend parler de telle mission, de telle œuvre, de telle vie? Rien de tout cela, m’assure-t-elle; elle n’a jamais vu de religieuses de près, et ne ressent aucune envie de le faire. Mais puisque Jésus a donné sa vie pour nous, ajoute-t-elle, elle sent qu’il faut se montrer à la hauteur d’un tel don, et donner en retour tout ce qu’elle a. La vie religieuse, pour laquelle elle ne se sentait aucune attirance, lui paraissait donc le lieu adapté pour un tel contre-don sacrificiel. « Et donc, lui demandé-je malicieusement après m’être assuré qu’il n’y avait pas la moindre trace d’un appel au fond du cœur, parce que Jésus a donné sa vie pour nous, tu penses devoir gâcher la tienne pour essayer de lui faire plaisir ?»

(…)

Il faut avoir un peu d’humour sur soi-même pour ne pas prendre au sérieux nos drames comiques et pour regarder en face, sans complaisance et sans excès, notre péché, de nous regarder aussi, pécheurs, avec douceur. Il y a un démon qu’il ne faut pas prendre trop au sérieux, parce qu’il aime cela: l’orgueil. Il est difficile à chasser, parce que nos vertus même le renforcent: le jeûne peut le nourrir, la prière peut le faire grandir, et si nous faisions des miracles, pas de doute, il saurait même en profiter. Mais il n’aime pas l’humour, parce qu’il n’en a pas, parce qu’il aime qu’on le prenne au sérieux, et il n’aime même que cela. Il a de l’orgueil, le démon de l’orgueil. Alors se moquer de lui, c’est encore le seul moyen de le chasser.

Je n’ignore pas qu’il y a un danger à ne vivre que dans l’humour et la dérision: il est difficile de descendre en profondeur; on se plaît en surface, parce qu’on n’affronte rien et qu’on peut continuer à trouver que tout est drôle. Il y a une manière de rire qui ne permet pas de vivre pleinement. Sans doute parce que c’est un rire qui se prend trop au sérieux, qui ne laisse pas de place au reste; un rire qui est trop lourd. Au contraire, ce que devrait nous apporter la joie, c’est un peu de légèreté. Dans l’humour, dans la vie.